Le jour où j’ai failli lâcher notre thérapie

Je crois qu’on pourrait rebaptiser « thérapie de couple » en « mon mari m’a accompagné dans ma prise de conscience que j’avais été maltraitée étant enfant »

Parce que oui, PapaCrapouille a été indélicat avec moi, une fois, quand on essayait de se retrouver après la naissance de Crapouillou. Cette indélicatesse a créé une réaction en chaîne que je n’aurais pas soupçonnée, que je ne comprenais pas, lui non plus ; ce qui nous a donc amené à notre thérapie.

Un cancer du bonheur

J’avais tous les comportements clichés d’une adulte qui n’est en fait qu’une enfant maltraité qui a grandi. Mais je n’en avais aucun souvenirs. Ou disons plutôt que ces souvenirs (très) douloureux étaient enfouis, bien tassés dans un coin de mon cerveau et que, même si je n’en avais pas conscience, ils agissaient. Un peu comme un cancer qui serait venu détruire progressivement mon bonheur.

Le pouvoir de l’esprit

Mais cette faculté à oublier, à ranger sagement dans un coin les douleurs, c’est au final ce qui m’a permis de survivre jusqu’ici. De grandir. D’avancer. De vivre. Si j’avais eu la pleine conscience en grandissant de ce que j’ai vécu enfant, je n’aurais sans doute jamais grandi. J’aurais sans doute trouvé ce monde trop cruel pour décider d’y tenter ma chance. Mon cerveau, cette chose incroyable, a donc décidé d’occulter pour je puisse vivre.

Réalité alternative

Du coup il y a plein de choses de mon enfance dont je n’ai pas souvenir. Quand on me les raconte lors des réunions de famille, c’est un peu comme si on me racontais un film que je n’ai jamais vu. Je n’ai pas de vrai souvenirs continus avant le collège. Juste des bribes de moments heureux (ou pas) par ci par là. J’ai parfois l’impression d’être née au collège et de n’avoir pas eu d’enfance.

Ma très chère Pandore …

Notre thérapeute a été très habile sur ce coup là. Au début elle me disait :

Oui il y a eu quelques petits dysfonctionnements dans votre famille.

Et puis progressivement elle s’indignait de plus en plus fort

Mais c’est quoi cette histoire !? Vous vous verriez faire vivre ça à votre fils ?

Jusqu’aux jours où elle m’a fait prononcer les mots qui m’ont tellement bouleversé que j’en ai vomi dans la rue en sortant de la séance :

Et encore, dire que vous avez été maltraitée, c’est léger pour décrire ce que vous avez vécu.

Et c’est là que j’ai voulu tout arrêter. Je n’ai plus contacte avec mon père depuis des années, mais j’ai encore ma mère. Que j’aime. Malgré tout. Et même si je n’ai jamais été heureuse de ma relation à ma mère et de ma relation fraternelle, j’avais trouvé un compromis, une place dans tous ces dysfonctionnement où je pouvais exister, vivre, certes la tête dans le sable, mais vivre quand même.

Or là, je voyais tout en face.

Beaucoup (trop) de choses ont refait surface.

… merci

Ce qu’il y a de bien à avoir ouvert cette boite de Pandore, aussi violent fusse-t-il pour moi d’affronter mes démons, c’est que je peux enfin me défaire de mon cancer du bonheur. Un peu comme la chimiothérapie, parfois le traitement semble plus violent que le cancer lui-même et pourtant! J’arrive à communiquer à nouveau. PapaCrapouille et moi sommes encore plus proches qu’avant. Je sais que je protègerai mon Crapouillou encore mieux qu’avant. J’arrive enfin à laisser ma colère derrière moi et à pardonner à ceux qui m’ont fait vivre l’enfer sur terre. Mes comportements erratiques disparaissent. Mes peurs infondées s’envolent. Et je me découvre petit à petit une sérénité que je ne soupçonnais pas pouvoir connaître un jour.

Mes nuits sont encore ponctuées de cauchemars, le chemin est encore long, mais je suis sur la bonne voie.

Parce qu’être une jeune maman épanouie (ou presque!) c’est possible même en ayant eu une enfance baffouée.

5 réflexions sur “Le jour où j’ai failli lâcher notre thérapie

    • epanouieoupresque dit :

      Merci Freyja. Comme je le disais en réponse au commentaire de Marion, je n’ai pas tellement de mérite : j’ai tout occulté pendant des années, ça a refait surface un jour, mis en péril mon couple, et l’Amour qu’on se porte avec PapaCrapouille nous a sauvé. M’a sauvé. Je suis allée faire un tour sur ton blog, mais, tu vois, je n’arrive pas à le lire, car certaines choses font trop écho. La peur des mots, comme tu l’écris si bien.
      Bravo d’arriver à l’écrire

      Aimé par 1 personne

      • Freyja dit :

        Je comprends. tu sais j’ai le même sentiment au final. quand on me dit que j’ai du courage; je réponds que je n’ai pas décidé d’en avoir. c’est de la survie, un vaste réflexe de préservation.
        Pour cet écho qui empêche de lire, pareil, je comprends tout à fait. Lorsque je tombe sur des blogs qui parlent trop explicitement de sexualité, je tourne les talons instantanément.

        En tous les cas je réitère : ton article est très beau 🙂

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